mardi 4 décembre 2007

On the path to self-destruction

Assise dans mon coin noir, le regard fixé dans le vide, j’avais l’impression d’être totalement seule au monde. La solitude et la souffrance envahissaient totalement mon cœur, mais ainsi imprégnée dans mon élément, je me sentais presque bien. Moi, seule, ignorée du reste du monde, avec pour seuls compagnons ma propre noirceur et la souffrance que j’avais semée. I guess this is how it has to be. Mais j’ai l’impression que ce n’est pas assez. J’ai tué Talis, même en ignorant tout le reste, il faut que je paye. Mes doigts s’enfonçaient dans les paumes de mes mains jusqu’à en laisser des marques. Pense Lilianna, pense. Il doit bien y avoir un moyen de me faire payer pour tout le mal que j’ai fait. Quoique… Forcée d’être séparée de Nakago, c’est déjà pas mal. Et puis, en y réfléchissant, je n’ai pas eu à beaucoup me forcer pour souffrir. La souffrance me tombe dessus comme si c’était la chose la plus naturelle du monde. Et on dirait que je trouve toujours des gens pour me faire souffrir : ces hommes à Darsack, le bédouin dans le désert… Connaissant ma chance, je me ferai sans doute agresser à la prochaine ville que nous visiterons.

C’est tellement dommage que je ne puisse pas me mutiler comme je l’ai déjà fait. Il me semble que ça me ferait tellement de bien. Je dis «ne peux pas», parce que j’ai le feeling que ça fait partie des choses que Sigma ne veut pas que je fasse. Ce n’est pas grave, je suis certaine que d’autres tourments surviendront bien assez tôt. Justement… Sans dire un mot, Julius s’est avancé vers moi. Je m’attendais à des remontrances, à des remarques mesquines, mais il n’a absolument pas dit un mot. Il a jeté à mes pieds un sac et il s’est éloigné. Ok… Dans le sac, il y avait… tout ce qu’il m’avait confisqué sur le Sky Legacy. Mon argent, mes Trollinol (maintenant je suis full equip si jamais je veux me suicide!), ma robe de bal (Yééé. Quelque chose d’autre qui vient de chez Cobalté.), mon argent et… le pyjama de Talis. Mes mains tremblaient quand j’ai saisi le tissu.

C’est un cadeau de Bob! Tout le monde de l’armée se moquait de moi!

Je me souviens des mots qu’il a prononcés comme si c’était hier. Je ferme mes yeux et j’entends sa voix, je revois son visage. Si j’avançais ma main, je pourrais lui toucher. Instinctivement, j’ai fait le geste, mais je n’ai attrapé que le vide. Il n’est pas là. Il est parti. À cause de moi. J’ai serré le pyjama contre mon cœur et j’ai senti les larmes couler au coin de mes yeux. Ne t’en fais pas Talis. Je te promets de m’arranger pour qu’elle l’ait. C’est à elle qu’il doit revenir. De toute façon, le garder en ma possession m’occasionnerait des problèmes plus qu’autre chose. J’avais raison quand je disais que la souffrance me tombait dessus sans que j’aie à faire quoi que ce soit, n’est-ce pas?

Comme je l’ai déjà mentionné un jour, c’est dans les instants où l’on désire être seul qu’on ne réussit jamais à l’être. Après Julius, ce fut au tour de Kerns de venir me voir. J’ai à peine eu le temps d’essuyer mes larmes qu’il s’est assis à côté de moi.
-Salut Lili!
-Salut.
-Ça va?
-Bien sûr.
-Tu es une très mauvaise menteuse, tu sais?
-Je sais. C’est pour ça que je regarde le plancher.
-Tiens!
Il m’a tendu une bouteille de vin. La tentation était très grande de la prendre, mais je n’ai eu qu’à me souvenir de l’émotion horrible qui m’avait assaillie après que Talis m’ait engueulée pour que l’envie disparaisse. Je me suis juré de ne plus jamais boire une goutte d’alcool et j’ai bien l’intention de tenir parole.
-Ce n’est pas une bonne idée, lui aie-je répondu.
-Ok d’abord! Tiens!
Il m’a tendu une ration.
-Ça c’est une bonne idée… Merci.

J’ai pris la ration et j’ai commencé à manger. J’avais faim, mais la motivation n’y était pas. J’avais l’impression que la nourriture goûtait la cendre et j’avais toutes les misères du monde à avaler la plus petite des bouchées.
-On se doit toujours une beuverie, tu sais? m’a dit Kerns.
(Tu te souviens de ça?)
-La dernière fois que j’ai bu, ça ne s’est pas très bien passé, alors plus jamais.
-Très bien! Alors tu prendras de l’eau et tu me regarderas boire!
-…
-Ça va aller Lili!
-Non, je ne crois pas.
-Oui, ça va aller! Ne t’en fais pas, on va la retrouver Tania!
-(Mon bébé…) …Même si on la retrouve, je ne peux pas la garder avec moi.
-Ne dis pas ça, ça va aller!
-Non, je ne crois pas. Pas avec la cicatrice que j’ai dans le dos.
-Pour ça… Tu voudrais que je te change ton bandage? Ou je pourrais demander à Shiva?
-…Je m’en fiche.
-C’est comme tu veux Lili.
-Je m’en fous Kerns.
(Comme j’ai dit à Lou, vu le nombre d’hommes qui m’ont vue toute nue dernièrement, un de plus ou de moins.)
-Je vais aller chercher Shiva, m’a dit Kerns.
Avant de partir, il m’a fait un mini hug, me serrant tout doucement contre lui, comme s’il avait peur de me briser. J’avais envie de le retenir et de pleurer dans ses bras, mais je n’ai rien fait. Il ne faut pas que je me laisse aller. Je n’en ai pas le droit.

Shiva est arrivée avec des bandages et le nécessaire pour nettoyer ma plaie.
-Kerns m’a demandé de venir pour…
-D’accord.
Je me suis placée dos à elle et j’ai levé mon chandail. Elle a détaché le bandage que j’avais et a nettoyé ma blessure. Je l’ai laissée faire sans dire un mot. Est-ce que ça sert vraiment à quelque chose de se donner tout ce mal?
-Ce n’est pas très beau, a commenté Shiva en me refaisant un nouveau bandage. Il va falloir faire quelque chose avant que…
-Il n’y a pas grand-chose à faire…
-Mais Vanna, elle pourrait se servir de la blood star pour vous aider.
-…Je ne crois pas qu’elle le fera.
-Pourquoi pas? Elle a bien aidé monsieur Jillian.
-Il y a monsieur Jillian et il y a moi.
-Pourquoi?
-Un mot qui commence par «tra» et qui finit par «hison». Plusieurs fois.
-Mais vous êtes revenue, non?
-Pas par choix.
-Vous avez été forcée?
Elle a jeté un de ces evil stares à Lou.
-Non, ce n’est pas Lou.
-Qui alors?
-…Si je te montre quelque chose, tu me promets de ne le dire à personne? Y compris à Lou et Kerns?
-Ok, I won’t tell.

J’ai abaissé mon chandail au niveau de l’épaule droite, juste assez pour qu’elle voie la marque de ma curse. Elle a ouvert de très grands yeux et j’ai aussitôt caché ma marque.
-That’s… That’s the forgetfulness curse.
-Yes.

-Qui vous a fait ça? Seul un mage très puissant…
-Tu ne devines pas qui?
-Non.
-La légitime propriétaire de mes ex-épées.
-La gardienne de l’ombre?
-Oui.
-Les guardians sont des créatures…
(Je ne me souviens pas du terme exact qu’elle a employé mais elle ne porte pas les guardians dans son cœur ça c’est certain.)
-C’était vraiment méchant, aie-je dit à Shiva, mais c’était brillant. C’était la seule manière de s’assurer que je fasse ce qu’elle voulait. Elle sait très bien que je préférerais me tirer plutôt que de le perdre.
-À Merra, nous avons… nous avions des mages très puissants qui pouvaient enlever n’importe quelle curse. Mais c’était il y a mille ans.
-Ce n’est pas grave, je le mérite.
-Non.
-Oui.
-Non. Personne ne mérite d’être cursé de cette manière.
-Moi oui.
(N’essaie pas d’épargner mes sentiments Shiva. Je sais très bien que c’est un châtiment tout à fait juste et amplement mérité.)

J’ai senti que Shiva terminait le bandage et j’ai rabaissé mon chandail.
-Voilà, j’ai fini. Mais il faudrait vraiment faire quelque chose pour…
-C’est correct. Je vais peut-être mourir c’est tout. Tout le monde serait mieux comme ça.
-Non, ne dites pas ça.
(J’oubliais, j’ai une pierre.)
-C’est vrai.
-Non. L’homme qui a été affecté par la curse, vous ne pensez pas qu’il serait triste?
-…
(Nakago… Muuu.)
-Cette curse affecte la personne la plus importante dans votre cœur… Mais il faut que les sentiments soient réciproques.
-…
(Tu me manques tellement Nakago. J’ai besoin de toi, si tu savais.)
-Bon. Je vais retourner voir Kerns et Lou.
-Moi je vais aller jouer au mur ailleurs.
-D’accord…

Je lui ai rapidement tournée le dos, pour éviter qu’elle ne voie mes larmes et je suis partie à la recherche d’un endroit où je ne risquais pas d’être dérangée. Tout le monde avait l’air d’être dans le temple, alors ça ne devrait pas être trop difficile. Je suis sortie du temple et je me suis retrouvée dans la maison de Sheyenne. Son lit est petit, mais il a l’air confortable… Non, je ne devrais pas penser à m’octroyer du confort. Je me suis rendue jusqu’au mur le plus proche et je me suis couchée en petite boule par terre. Je sentais les larmes couler sans que je ne puisse les arrêter. J’ai tenté de les retenir le plus longtemps possible, mais j’ai échoué. Prenant ma tête entre mes mains, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps jusqu’à ce que je sois complètement épuisée. Et j’avais toujours aussi mal. Pourquoi j’ai toujours mal? Pourquoi la douleur ne disparaît jamais? J’ai sorti ma bouteille de Prozac de mon sac et j’ai pris deux pilules. Je sais bien qu’Esmeralda a dit une pilule par jour, mais ce n’est pas une dose suffisante pour moi. Si je ne double pas la dose, je me sens aussi mal que si je n’avais rien pris. Comme de fait, j’ai rapidement senti le calme m’envahir tandis que je fermais mes yeux. Je suis si fatiguée, mais je ne veux pas dormir parce que je sais très bien comment se passera ma nuit. Mais mes yeux se ferment tous seuls. Il vaut mieux que j’arrête de combattre l’inévitable. Je me demande de quoi seront peuplés mes cauchemars cette nuit…?

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