mercredi 30 janvier 2008

Chapter 1-The first meeting

C’était une journée comme toutes les autres. J’avais fait la grasse matinée. Pourquoi me serais-je levée plus tôt alors que j’étais en si bonne compagnie? Une fois seule, j’ai pris tout mon temps pour me refaire une beauté et quand j’ai été pleinement satisfaite du résultat, je suis sortie. J’allais sans doute passer une bonne partie de l’après-midi à magasiner et je retournerais travailler. La vie d’une prostituée était somme toute plutôt routinière : des hommes et des futilités. That’s it. Mais je ne me plaignais pas. Pourquoi l’aurais-je fait? Je ne manquais jamais de rien et je rencontrais plus d’hommes séduisants que je ne pouvais en satisfaire.

J’avais beau avoir de la classe, je n’étais quand même une prostituée. C’était ça ma vie. Même si ça ne m’avait pas plu, qu’aurais-je pu faire d’autre? J’exerçais de métier depuis si longtemps que je ne savais rien faire d’autre. Si j’avais voulu partir, où serais-je allée? Vers qui me serais-je tournée? Je n’avais plus personne. La seule famille qui me restait, c’était les gens au bordel, mais aucun, à part quelques rares, ne tenait vraiment à moi. Je me sentais totalement seule. À quoi ça servait de toute façon de s’attacher à quelqu’un? On s’attachait et on finissait immanquablement par être trahi d’une façon ou d’une autre.

Quoiqu’il en soit, cette journée n’était en rien différente des autres et rien ne laissait présager qu’elle allait changer dramatiquement, d’abord pour le pire et puis pour le meilleur. Car c’est cette journée que j’ai rencontré pour la première fois un homme qui changea ma vie à jamais, car il vola mon cœur dès l’instant où j’ai posé mes yeux sur lui. Je ne l’aurais jamais avoué à ce moment-là (je ne croyais plus en l’amour depuis bien longtemps), mais c’est pourtant ce qu’il a fait.

J’étais donc en train de m’en retourner chez moi (si on pouvait appeler un bordel «chez soi») quand j’ai remarqué deux hommes qui me regardaient avec beaucoup d’insistance. Je ne leur ai pas accordé plus d’importance que ça. Ils n’étaient ni assez beaux ni assez riches pour que je perde mon temps avec eux. J’ai donc continué mon chemin sans plus m’en préoccuper. J’étais presque arrivée à destination quand deux mains se sont posées sur mes épaules : c’était les deux hommes de tout à l’heure Urgh.
-Salut ma jolie.
-Ôtez vos mains de sur moi.
Je les ai repoussés et j’ai continué mon chemin.
-Pas la peine de monter sur tes grands chevaux ma belle. On voudrait seulement faire plus ample connaissance…
Je savais très bien de quelle manière ils voulaient faire connaissance avec moi et ew, très peu pour moi.
-Premièrement, je ne suis pas «votre» belle. Deuxièmement, je n’ai aucune envie de faire connaissance avec vous deux.
-Alors on fait sa difficile? C’est quoi ton prix?
-…Pardon?
-T’es une pute, non? Alors c’est quoi ton prix?
(Ils sont attardés ou quoi? Ils pensent vraiment qu’ils ont les moyens de m’avoir?)
-Vous ne pourrez jamais vous permettre ce que je vaux. Vu votre allure, vous ne pouvez vous permettre qu’une prostituée de bas étage. Alors allez donc voir ailleurs si j’y suis.

Je pensais que le message avait été on ne peut plus clair, alors je suis partie. Il y a vraiment des crétins partout. Ce n’est pas parce que je suis une prostituée que n’importe qui peut m’approcher et m’avoir. J’ai regardé avec dégoût mes épaules, là où les deux hommes m’avaient touchée. I think I’m going to wash myself when I get back. J’avais à peine fait quelques pas qu’on tordait mon bras droit dans mon dos et une dague s’enfonçait entre mes deux omoplates. J’ai essayé de me débattre, mais la pression s’est resserrée, m’arrachant un cri de douleur.
-Ow!
-Si tu sais ce qui est bon pour toi, tu vas venir bien gentiment avec nous.
Je n’avais pas envie de perdre un bras ou pire d’être défigurée, alors je me suis docilement laissée amener jusqu’à une ruelle et à la première occasion, j’ai frappé là où il le fallait et je me suis enfuie.

J’ai couru le plus vite que je pouvais, mais je ne suis pas allée bien loin. Vous avez déjà essayé de courir en talons hauts? Je suis donc tombée par terre et avant que je ne me relève, ils m’avaient immobilisée et retournée sur le dos. L’un d’eux tenait mes bras et l’autre a relevé ma jupe et a écarté mes jambes. Je n’avais pas vraiment peur, ayant déjà vécu cette situation à plusieurs reprises. J’étais plutôt furieuse et bien décidée à me défendre coûte que coûte. J’ai essayé de le repousser à coups de talons, mais il m’a calmée d’un coup de poing si violent que j’ai tout de suite su que ça laisserait une marque.
-Ow!
-C’est tout ce que tu mérites, sale pute!

Profitant du fait que j’étais un peu sonnée, il a abaissé mon corset et a commencé à me tripoter d’une main tout en détachant son pantalon de l’autre.
-Non! Au secours! Quelqu’un!
-Au secours? Tu n’es qu’une pute! Qui crois-tu qui va venir te sauver?
-Moi.
J’ai levé les yeux vers la voix et c’est là que je l’ai vu pour la première fois. Rien qu’à voir sa carrure, je pouvais deviner qu’il était un soldat. Il était grand, blond, tellement rourou que je me suis mise à le fixer la bouche grande ouverte (ça existe des mecs beaux comme ça?) et il avait un regard bleu des plus hypnotisants. Un regard d’ailleurs qui, s’il pouvait tuer, l’aurait déjà fait.
-Hé mec! La pute elle est à nous! Alors si tu la veux, tu attendras ton tour!
-Faux. Elle n’appartient à personne, à vous moins qu’à tout autre.

Il n’élevait pas la voix, mais son ton était très équivoque : on aurait dit qu’il attendait le bon moment pour déchaîner sa colère.
-T’es sourd ou quoi? J’ai dit qu…
Il s’est écroulé par terre avant d’avoir fini sa phrase, transpercé par l’épée de l’inconnu.
-Espèce de…!
Son ami m’a lâchée et il s’est élancé vers celui qui venait de tuer son ami. Moi, je me suis encastrée dans un mur, j’ai replacé mes vêtements du mieux que je pouvais et j’ai fermé mes yeux, priant en silence pour que ce soit l’inconnu qui gagne.

Les bruits du combat ont semblé durer une éternité, mais en réalité, tout s’est déroulé en à peine une minute. Le silence régnait dans la ruelle, mais je n’osais pas regarder. Je saurais bien assez tôt qui avait gagné. Des pas se sont dirigés vers moi et quelqu’un s’est agenouillé devant moi. Une main s’est doucement posée sur ma joue.
-Vous pouvez ouvrir les yeux mademoiselle, c’est terminé.
Dès que j’ai reconnu la voix de l’inconnu, j’ai ouvert les yeux. C’était bien lui qui était devant moi. Quant à l’autre type… ew. Je ne pense pas que même sa mère l’aurait reconnu. Je me suis retournée vers mon sauveur.
-Est-ce que ça va? m’a-t-il demandé.
-…
Comment ça pourrait ne pas aller? Un bel inconnu venait d’empêcher deux brigands de bas étage/attardés finis de me violer. Et tout chez cet inconnu transcendait la douceur : ses gestes, son regard, sa voix… Je me sentais si… rassurée. Je ne m’étais jamais sentie comme ça, encore moins avec un homme.

-Mademoiselle…?
-…
Mais si je me trompais? Si sa gentillesse n’était qu’une façade? S’il avait en fait prévu de finir ce que mes agresseurs avaient commencé?
-Miss…?
J’ai repoussé sa main et je me suis encastrée encore plus dans le mur, si cela était possible.
-Are you going to finish what they started?
-...What?
Il m’a regardée comme si je lui avais demandé quel était le sens de l’existence, c’est-à-dire avec une expression qui voulait dire «Huh? What the fuck?».
-Are you going to finish what they started?
-...Je suis vraiment désolé que vous me pensiez capable d’une telle chose. Je veux seulement vous aider.
-Et pourquoi donc?
-Pourquoi pas?
-Regardez-moi! Je suis une prostituée! La plupart des hommes que je rencontre veulent coucher avec moi ou m’agresser! Pas m’aider! Alors pourquoi seriez-vous différent des autres?
-Parce que je ne suis pas comme la plupart des hommes.
-…

Je l’ai regardé sans rien dire. J’étais diablement sur la défensive et lui, loin d’être fâché, était toujours aussi calme et gentil. Il l’était tellement que ma garde s’est abaissée le plus naturellement du monde. Est-ce que ça existe vraiment des hommes comme lui? Des hommes qui aident les damoiselles… dans ce cas-ci les prostituées en détresse sans rien demander en retour? Je dois rêver…
-Are you for real? lui aie-je demandé.
-Yes, I am.
Il a enlevé sa cape et la posée sur mes épaules pour me couvrir.
-Alors, est-ce que ça va mademoiselle? Vous avez besoin de quelque chose?
-Euh… Je…
Maintenant que je réalisais à quel point j’étais passée près de subir les pires outrages, c’est comme si tout le choc de l’attaque me tombait dessus d’un coup. Je n’avais envie que d’une chose, c’était que quelqu’un me serre dans ses bras et me laisse pleurer jusqu’à épuisement. Mais je ne pouvais pas lui demander ça. Je n’ai pas eu à le faire. Soit il a lui dans mes pensées, soit il a vu les larmes qui coulaient sur mes joues, mais quoiqu’il en soit, il a passé ses bras autour de moi et m’a serrée contre lui.

Je considérais la plupart des émotions comme des faiblesses, mais à ce moment-là, j’ai eu l’impression de perdre le contrôle de mon corps. Je me suis accrochée à lui, j’ai enfoui ma tête dans son épaule et j’ai pleuré comme jamais auparavant. Tout le temps que mes sanglots ont duré, il n’a rien dit. Il a simplement accoté sa tête sur la mienne et m’a frotté le dos jusqu’à ce que je me calme, beaucoup plus tard.

Même après que j’aie arrêté de pleurer, je suis restée contre lui. Il sentait si bon… Je me sentais si bien… Est-ce que c’est moi ou est-ce que son cœur bat en harmonie avec le mien?
-Ça va aller? m’a-t-il redemandé.
-…Ojejez?
-Hein?
-Euh… Je veux dire oui! Euh… Désolée de m’être laissée aller comme ça. Je ne sais pas ce qui m’a pris.
-Ne vous excusez pas. Vous en aviez besoin, c’est tout.
Le plus doucement du monde, comme s’il craignait de me faire fuir, il a essuyé mes larmes et il m’a aidée à me remettre debout.
-Maintenant, dites-moi ce où je peux vous ramener pour que vous soyez en sécurité.
-Euh…
Je n’avais jamais eu honte de ce que je faisais. Pourquoi aurais-je eu honte d’ailleurs? C’était un métier comme un autre et j’étais l’une des meilleures. Mais devant cet homme si génial, je me sentais gênée de dire le nom de mon bordel. Je ne le connaissais pas et ne le reverrais jamais, mais sans que je puisse l’expliquer, je n’avais pas envie qu’il voit cette partie de moi.

-Ne soyez pas gênée, m’a-t-il dit. Je suis certain que vous avez une bonne raison de faire ce que vous faites. Vous n’aviez sans doute pas le choix.
-(Il lit dans mes pensées ou quoi?) Je…
-Vous n’avez pas à vous justifier. Je ne vous ai pas sauvée pour avoir des réponses.
-Pourquoi alors?
-Pour le simple plaisir de vous voir sourire.
Il semblait si sincère que je n’ai pas pu m’empêcher d’esquisser un sourire. Je ne crois pas qu’on ne m’ait jamais demandé quelque chose d’aussi mignon.
-Vous voyez? Ce n’était pas si difficile. Maintenant, dites-moi où je peux vous ramener.
J’ai baissé les yeux et j’ai marmonné le nom de mon bordel. Il a bien vu que malgré ce qu’il m’avait dit, ça me gênait d’en parler. Il n’a pas insisté. Il m’a simplement tendu son bras pour que je m’y accroche et il m’a raccompagnée.

Arrivée à destination, j’aurais bien voulu lui dire quelque chose pour retarder son départ, mais je ne savais pas quoi dire.
-Merci… de m’avoir sauvée.
-Ne me remerciez pas, ce fut tout naturel.
C’était le moment des adieux, alors j’ai fait le geste d’enlever sa cape pour la lui redonner.
-Non, gardez-la, m’a-t-il dit. Comme ça, vous ne m’oublierez pas.
-Ça, ça ne risque pas d’arriver… Je… Je sais que je n’ai pas le droit de vous demander quoi que ce soit, mais…
-Oui…?
-Votre nom. J’aimerais connaître votre nom.
-Nakago. Mademoiselle…?
-Lilianna.
-Et bien, mademoiselle Lilianna, ce fut un plaisir de vous rencontrer et ce sera un plaisir encore plus grand de vous revoir.

Il a ensuite tendu sa main vers moi. J’ai cru qu’il voulait juste me serrer la main, mais quand j’ai serré ma main dans la sienne, il s’est penché et m’a fait un baise-main. Huh? Il est vraiment trop génial pour être vrai, alors soit je rêve ou soit il vient d’une autre planète.
-Au revoir.
-Au revoir, lui aie-je murmuré.
Il s’est éloigné de moi et a gardé mes doigts emprisonnés dans les siens jusqu’à ce qu’il n’ait plus le choix de les lâcher pour pouvoir partir. Il m’a tourné le dos et s’est éloigné. Je l’ai suivi du regard jusqu’à ce qu’il ne soit plus qu’un petit point à l’horizon.
-Adieu Nakago.
C’est gentil de me l’avoir fait croire, mais je ne pense pas, non… je sais que nous ne nous reverrons jamais. Les filles comme moi ne méritent pas des hommes comme vous.

Je suis rentrée à l’intérieur, sinon je risquais de passer le restant de la journée à regarder dans la direction où il était parti.
-Lilianna! Ça va?
-What happened? Look at your face!
-Yes, I know, leur aie-je répondu. Big bruise.
-Qui t’a fait ça? C’est l’homme qui t’a ramenée?
Lui? Après ce qu’il venait de faire pour moi, je ne l’imaginais pas du tout en train de frapper une femme.
-Non. Lui, il m’a sauvée.
-Qui était-il?
J’ai resserré sa cape autour de mes épaules et j’ai souri.
-Lilianna…?
-He was my knight in his shining armor.

It’s just too bad that I won’t ever see him again...

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